Dans son livre Des lumières sur le ciel, Bénédicte Chenu raconte le combat qu'elle mène avec son fils Charles, diagnostiqué avec une schizophrénie à l'âge de 17 ans, pour qu'il puisse vivre une vie apaisée et autonome. Découvrez l'interview de l'auteure, très engagée dans la prise en charges des schizophrénies en France.
Interview de Bénédicte Chenu
Pourquoi ce livre ? Quel message voudriez-vous faire passer ?
J’avais envie d’écrire sur ces neuf dernières années en partant de l’annonce du diagnostic à aujourd'hui. Décrire le chemin parcouru et les situations vécues.
Ce témoignage me permet de partager mon expérience de façon libre et authentique. Il part de mon vécu et je souhaite qu’il éclaire sur la réalité du quotidien de ces maladies. Je voulais sortir des clichés négatifs et dédramatiser ces troubles dont il ne faut pas avoir honte. Et puis dire qu’un rétablissement est possible pour les schizophrénies, qu’il ne faut jamais rien lâcher rester curieux et ne pas se laisser faire. Beaucoup de témoignages de personnes concernées attestent aujourd'hui qu’une qualité de vie est possible.
Pourquoi la schizophrénie, qui est une maladie comme les autres, n’est pas traitée comme les autres ?
Les schizophrénies sont des troubles psychotiques qui se caractérisent par l’apparition, à certains moments, d’une anomalie du traitement de l’information par le cerveau, entraînant pour la personne des troubles de la perception. Pendant longtemps on a associé ces troubles à l’âme, à l’esprit et on a considéré à tort ces maladies comme chroniques et sans aucun espoir possible.
Aujourd'hui, à l’instar d’autres maladies, les bonnes pratiques pour une meilleure prise en charge ne sont pas toujours appliquées par les professionnels de santé, parce qu’il existe encore en France différentes chapelles théoriques qui ne s’accordent pas sur les fondements de ces troubles et freinent considérablement les chances de rétablissement pour les patients.
Aujourd'hui, en France, d’un Centre médico-psychologique à l’autre, les propositions thérapeutiques sont très différentes. Certains vont proposer des bilans psy et de la remédiation cognitive alors que d’autres vont proposer des ateliers culinaires. Dans une optique consistant à gagner du temps sur les troubles, il faut savoir ce qui est efficace dès le début pour un jeune qui commence sa vie d’adulte ou pour une personne qui cherche à rattraper du temps perdu.
Pourtant avec les avancées de la science, la connaissance des recommandations internationales, l’implication des familles, des proches et des professionnels de santé, une bonne qualité de rétablissement est possible pour les patients.
Pourquoi est-il important de parler des schizophrénies et non de la schizophrénie ?
Dès le début de la création du Collectif Schizophrénies nous avons tenu à parler des schizophrénies au pluriel car il s’agit d’un syndrome ; un ensemble de symptômes très divers qui n’impactent pas forcément tous les patients et de la même manière.
Ces troubles ont des formes très diverses que l’on ne peut pas enfermer dans une seule maladie. La définition de la schizophrénie peut évoluer avec l’avancée des connaissances.
Pourquoi est-il nécessaire de déstigmatiser cette maladie ou en quoi est-elle encore trop stigmatisée ?
En France, en 2019, la stigmatisation est un frein énorme pour les soins, elle induit un retard de diagnostic important d’environ sept ans. La stigmatisation ou l’auto-stigmatisation exclut les personnes touchées.
Tous les jours on peut entendre à la télévision, à la radio ou sur les réseaux sociaux le mot « schizophrénie » utilisé dans un sens métaphorique pour décrire une situation paradoxale ou malsaine et également des corrélations constantes avec la violence ou le dédoublement de la personnalité.
Les schizophrénies sont des troubles mortels, 40 % des malades font une tentative de suicide et 10 % y parviennent. La déstigmatisation des schizophrénies est un enjeu de santé publique.
Pouvez-vous parler de votre action avec le Collectif Schizophrénies et l’association PromesseS ?
Après avoir suivi la formation Profamille, une des premières actions de l’association PromesseS a été la réalisation d’une étude lexicologique sur l’utilisation du mot « schizophrénies » dans la presse écrite. Cette étude nous a permis de comprendre en profondeur le mésusage de ce mot et d’explorer les pistes d’améliorations afin de mieux informer le grand public.
Nous avons reçu le prix de la communication scientifique au congrès de l’encéphale en 2016, ce qui nous a aidés à nous faire connaître dans le milieu de la santé mentale. Nous avons décidé de fédérer nos expériences en regroupant 7 associations dédiées aux schizophrénies sous l’égide du Collectif Schizophrénies.
En décembre 2017 nous avons mis en ligne le premier portail français indépendant sur les schizophrénies afin de donner une information claire et indépendante et d’apporter des solutions concrètes pour faire face au quotidien.
Aujourd'hui, nous sommes en train de réaliser une cartographie des ressources afin que toute personne qui rentre son adresse puisse avoir connaissance des services appropriés existant à proximité de chez elle : psychiatre, psychologue, centre de remédiation cognitive, groupe d’entraide, etc. Ce portail a pour ambition d’être la référence pour une information éclairée sur ces maladies. Il est indépendant, financé en partie par le ministère de la Santé et par des financements privés.
Découvrez l'interview de Bénédicte Chenu par MinuteBuzz :
Journées de la Schizophrénie
À l’occasion des journées de la schizophrénie, l’association PromesseS organise le dimanche 17 mars de 14h30 à 20h00 un après-midi de rencontres débats, conférences et concerts autour du thème « Tout débute par une connexion ».
Public :
Tout public, Entrée gratuite
Le lieu :
La Cité Internationale des Arts -
18 rue de l'Hôtel de Ville
75004 Paris
(Métro Pont Marie)
Le programme :
> Ouverture des portes à 14 h 30 précises !
> Introduction de l’après-midi par Valérie Cordy, artiste et performeuse ;
> Présentation des avancées du portail du Collectif schizophrénies par Fabienne Blain, présidente du Collectif schizophrénies ;
> Table ronde « Rétablissement, tout débute par une connexion » avec la participation du Dr Gozlan, (directeur du SAMSAH Prepsy), M Karl Dirat, (Maire de Villabé, vice-président de Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart), Stéphane Cognon (auteur de Je reviens d’un long voyage), Bénédicte Chenu (auteure avec Camille Sayart de Des lumières sur le ciel).
> Concert de Slam par Florent Babillote et Claude Hazel ;
> Échanges autour d’un verre ;
> Dédicaces d’ouvrages par leurs auteurs : Bénédicte Chenu pour Des lumières sur le ciel, Léanne pour La montagne escarpée, Florent Babillotte pour Obscure Clarté, Stéphane Cognon pour Je reviens d’un long voyage, Benoît Majerus pour Du Moyen Age à nos jours, expériences et représentations de la folie à Paris ;
> Lectures à deux voix de « Paroles de Profamille » – Carole Plas et Elisabeth Boussion ;
> Concert de Jazz – Luxe Trio ;
Valérie Cordy ponctuera avec humour cet après-midi de ses performances numériques !
Pour en savoir plus : https://www.facebook.com/schizinfo
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