Comme la plupart des gens, vous pensez sûrement que pour être
motivé (au travail, à la maison, peu importe), il faut soit une récompense digne de ce nom, soit une éventuelle sanction en cas d'échec. La logique de la carotte et du bâton en somme...
Pourtant, le livre La vérité sur ce qui nous motive (traduction du best-seller international Drive) malmène allègrement cette théorie simpliste et propose un nouveau système de motivation bien plus en phase avec notre époque, la complexité de nos tâches et la créativité qu'elles demandent.
Comme nul n'est mieux qualifié que l'auteur lui-même pour vous expliquer de quoi il retourne, voici un petit avant-goût de ce chef-d'oeuvre magistral, histoire de comprendre un peu comment on en est arrivés (au XXIe siècle quand même !) à appliquer exactement les mêmes systèmes qu'il y a deux siècles...
Extrait de La vérité sur ce qui nous motive de Daniel H. Pink :
« Au tout début de l’humanité – vraiment le tout début, il y a environ 50 000 ans – les principes qui sous-tendaient le comportement humain étaient simples. Nos ancêtres s’efforçaient de survivre. Qu’il s’agisse de trouver de la nourriture dans la savane ou de se réfugier dans les bois quand un félin aux dents longues était dans les parages, leur comportement était guidé essentiellement par l’instinct de survie. Appelons ce système d’exploitation primitif Motivation 1.0. Il n’était pas très subtil et ne différait pas beaucoup de celui des singes rhésus, des grands singes et d’un certain nombre d’autres espèces animales, mais il était bien utile à nos ancêtres. Il a très bien fonctionné, pendant un certain temps.
À mesure que les êtres humains formaient des sociétés plus complexes dans lesquelles il était nécessaire aussi bien de coopérer en vue du bien commun que de combattre les étrangers, [...] nous avons progressivement remplacé notre système par une version plus compatible avec notre nouvelle façon de travailler et de vivre.
Ce nouveau système d’exploitation, plus perfectionné, reposait sur une supposition revue et corrigée, selon laquelle l’être humain est plus que la somme de ses pulsions biologiques. La motivation biologique
L’exploitation de ce second type de motivation a joué un rôle essentiel dans le progrès économique dans le monde entier, surtout au cours des deux derniers siècles. Considérons la Révolution industrielle. Des créations technologiques comme la machine à vapeur, le chemin de fer et l’électricité ont été fondamentales pour le développement de l’industrie, mais il en a été de même de certaines innovations moins voyantes, en particulier les travaux d’un ingénieur américain, Frederick Taylor. Au tout début du XXe siècle, trouvant la gestion des entreprises inefficace et peu méthodique, Taylor inventa ce qu’il appela l’organisation scientifique du travail. C’était une forme de "logiciel" conçue d’une main experte pour fonctionner sur la plate-forme Motivation 2.0. Son invention a connu un succès fulgurant.
[...] Le système d’exploitation Motivation 2.0 a très bien résisté à l’épreuve du temps. Il fait même tellement partie de nous que, le plus souvent, nous n’avons pas conscience de son existence. En effet, nous avons toujours tout organisé sur la base d’une supposition tenue pour acquise, à savoir que le meilleur moyen de progresser, d’accroître la productivité et d’encourager l’excellence consiste à récompenser celui qui fait bien et à sanctionner celui qui fait mal. [...] Finalement, nous autres humains ne serions pas fondamentalement différents des chevaux : pour nous faire avancer dans la bonne direction, il suffirait de nous faire miroiter une carotte plus belle ou de brandir un bâton plus gros.
Au cours du XXe siècle, les systèmes économiques sont devenus de plus en plus complexes et le monde du travail a fait appel à des compétences de plus en plus pointues, si bien que l’approche Motivation 2.0 s’est heurtée à certaines résistances. [...] En 1960, Douglas McGregor, professeur de management au MIT, a remis en question le principe selon lequel l’être humain resterait fondamentalement inerte en l’absence de récompenses et de sanctions. Pour lui, les gens avaient d’autres motivations plus élevées dont les entreprises pourraient tirer parti si leurs dirigeants savaient en tenir compte. De nombreuses entreprises ont donc cherché à accorder à leurs salariés davantage d’autonomie et à les aider à progresser mais le principe général est resté le même car il était tout de même facile à comprendre et à appliquer. Cependant, entre 2000 et 2010 – une période marquée par une véritable contre-performance en matière économique, technologique et sociale –, on s’est aperçu que ce bon vieux système d’exploitation ne fonctionnait plus aussi bien. Souvent, et de façon imprévisible, il provoque des pannes et l’on est obligé de trouver des palliatifs pour s’en sortir. Surtout, il se révèle incompatible avec un certain nombre d’aspects du monde actuel de l’entreprise et si nous étudions bien ces problèmes d’incompatibilité, nous ne pourrons pas manquer de nous apercevoir que de modestes mises à jour ne sauraient les résoudre. Ce qu’il nous faut, c’est une version vraiment nouvelle : Motivation 3.0. »
Découvrez la suite des idées de Dan Pink dans son livre La vérité sur ce qui nous motive (Leduc.s Éditions) mais aussi sur ce blog : d'autres billets avec des extraits inédits à lire très prochainement !
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